Qui est Marie-Madeleine, surnommée apôtre des apôtres ? Était-elle vraiment une prostituée ? Pourquoi est-elle si importante ?
Chez PRIXM, on adore Joaquin Phoenix — lorsqu'il met l'habit de Commode dans Gladiator, et surtout pour son interprétation de Johnny Cash dans Walk the Line. Imaginez alors notre enthousiasme quand nous avons su qu’il jouerait Jésus dans Marie-Madeleine... jusqu’au moment où nous avons lu les mots de notre critique de cinéma favori, le Père Denis Dupont-Fauville :
« Respecter son sujet exigerait autre chose que d’unir, sous la bannière d’une imagerie quasi sulpicienne, une totale désinvolture à l’égard des Écritures et une paresse stupéfiante quant à la mise en scène. »
Ça, c'est fait. Autant vous dire que cela nous a un peu déchauffés… Le réalisateur semble s'être inspiré de deux écrits apocryphes tardifs (l'évangile de Marie et les Actes de Paul et Thècle) ... mais on vous laisse vous faire votre avis !
Pendant la période pascale qui s’étend du dimanche de Pâques au dimanche de Pentecôte, nous vous proposons de plonger dans les récits de la Résurrection.
Après avoir couru au tombeau (retrouvez ici le texte et notre analyse), Pierre et Jean laissent Marie-Madeleine seule au tombeau.
Marie, cependant, restait dehors devant le tombeau, à pleurer.
Tout en pleurant, elle se baissa pour regarder à l’intérieur du sépulcre.
Elle distingue alors deux anges vêtus de blanc, assis l’un du côté de la tête, l’autre du côté des pieds, là où le corps de Jésus avait reposé.
Ils lui disent :
— Femme, qu’as-tu à pleurer ?
Elle leur répond :
— C’est parce qu’on a enlevé mon Seigneur, et je ne sais où on l’a mis.
Sur ces mots, elle fait volte-face et voit Jésus devant elle, sans savoir que c’était lui.
Jésus lui dit :
— Femme, que pleures-tu ? Qui cherches-tu ?
Marie, croyant qu’il s’agissait du jardinier, lui répond :
— Seigneur, si c’est toi qui l’a pris, dis-moi où tu l’as mis, et j’irai moi-même le reprendre.
Jésus lui dit : Marie !
Elle se retourne alors et lui dit :
— Rabbouni (ce qui veut dire « Maître ») !
Jésus lui répond :
— Ne me touche pas : je ne suis pas encore monté jusqu’au Père.
Va plutôt vers mes frères et dis-leur :
— Je vais monter vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu.
Marie de Magadala vient annoncer aux disciples :
— J’ai vu le Seigneur !, et voici ce qu'il m'a dit.
Dans l’Évangile selon Jean, Jésus apparaît pour la première fois après sa résurrection à une femme, Marie-Madeleine. Mais qui est cette femme proche de Jésus ? On a retrouvé sa trace dans les Évangiles pour vous montrer comment les papes, les théologiens féministes et les écrivains ont interprété cette figure.
Marie-Madeleine est explicitement nommée :
Et dans l'histoire de l'interprétation on l'a aussi reconnue sous les traits de :
À la fin du VIème siècle, le pape Grégoire le Grand, dans une de ses homélies, fait de toutes les figures que nous avons énumérées un personnage unique et composite.
Cela permit à Marie-Madeleine de connaître une popularité extraordinaire dans les Églises occidentales, où la mystique va nourrir pendant des siècles la littérature et la prédication, mais aussi l'abondance de l'histoire de l'art qui entoure ce personnage.
Dans l’Angleterre victorienne, magdalen était un euphémisme désignant une prostituée. En Irlande, on appelait aussi « madeleines » les femmes qui perturbaient l’ordre social, qu’on enfermait sans autre forme de procès.
Ni puritain ni complaisant, le sculpteur médiéval présente une Madeleine à la fois nue et totalement pudique, gratifiée par le Créateur d'une chevelure sublime qui symbolise la grâce couvrant tous ses anciens péchés...
À en croire nombre de théologiens féministes, l’Église aurait été victime d’un patriarcalisme séculaire en assimilant la dame de Magdala à une prostituée, pour mieux la déshonorer et refuser aux femmes toute leur place.
La vraie Marie de Magdala représente beaucoup plus que cela : la solidarité avec les mourants, la loyauté même face à la mort, le courage, la créativité, la persévérance.
Cependant, la théologie ancienne proclame que la gloire de Marie-Madeleine réside précisément dans le fait d’avoir été une prostituée pardonnée et convertie : « Ce qu’il y a de faible dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi pour confondre ce qui est fort » (1 Co 1,27).
En refusant l’image de la prostituée, de l’extatique ou de la sainte, c’est peut-être bien le rapport direct à Dieu, la grâce, qui est refusé. Récuser la gloire de la prostituée pardonnée, préférer la vertueuse moderne, n’est-ce pas encore souscrire à la morale bourgeoise ?
« Pourquoi réduire Marie-Madeleine à l’oppression féminine, quand elle est aussi une image de la libération humaine ? »
Régis Burnet, Marie-Madeleine. De la pécheresse repentie à l'épouse de Jésus. Paris : Cerf, 2008.