Dans la prière du Notre-Père, le chrétien dit à Dieu : « Délivre-nous du Mal ». Mais qu'entend-on par là ? Quelle est cette délivrance et qu'est-ce que le Mal ?
À écouter direct ! Un orchestre philharmonique qui accompagne les voix pour chanter Baba Yetu, le « Notre-Père » en Swahili : shot de bonne énergie garanti !
Jésus se trouve sur une montagne au bord du lac de Tibériade et il enseigne les disciples et les foules :
Lorsque vous priez, ne rabâchez pas comme les païens : ils s’imaginent qu’à force de paroles ils seront exaucés. Ne les imitez donc pas, car votre Père sait de quoi vous avez besoin, avant même que vous l’ayez demandé. Vous donc, priez ainsi :
Notre Père, qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié,
que ton règne vienne,
que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.
Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour.
Remets-nous nos dettes,
comme nous-mêmes nous remettons leurs dettes à nos débiteurs.
Et ne nous laisse pas entrer en tentation,
mais délivre-nous du Mal.
Dans la prière du Notre-Père, enseignée par Jésus à ses apôtres, le final dit : « Délivre-nous du Mal ». Mais de quel « mal » s’agit-il ? Et pourquoi la traduction liturgique officielle lui met-elle une majuscule ?
Force est de constater que le mal tient en échec les systèmes de pensée purement humains : il est peut-être même dangereux de vouloir tout dire du mal, l'expliquer, le rationaliser, au risque de le justifier. Le mal reste avant tout un mystère.
Paradoxalement, les métaphysiciens nous disent que « le mal est, et n'est pas » :
À la suite des Pères et notamment de saint Augustin, constatons que le mal est absence de bien : il relève d'un manque, du non-être. Il est plus exactement une privation. Pour prendre une image, il est comme un trou : comment décrire un trou, sinon par rapport à la substance qui l'entoure, et dont il est le défaut d'être ?
Le mal est toujours relatif au bien dont il prive, il est toujours second.
L'inverse n'est pas vrai, car le bien ne se définit pas par rapport au mal, mais par rapport à lui-même. Le mal ne peut être saisi en lui-même : le bien jouit donc d'une primauté sur le mal. Par exemple, l'aveugle souffre de la privation de la vue, la vue étant le bien premier permettant de définir le mal par contraste.
L'interprétation des métaphysiciens peut nous aider à approcher la question du mal en général, mais la prière Notre-Père a une toute autre dimension. Le mal dont nous supplions le Père de nous délivrer est bien identifié par l'Écriture : c'est le diable ou le Malin (avec sa majuscule), un ange déchu, créature plus forte que l'homme, et qui est à l'origine du mal. La puissance de cette créature explique pourquoi le mal semble parfois submerger l'humanité.
Mais Jésus nous fait demander au Père de nous en délivrer — mieux : par sa croix et sa résurrection, Jésus lui-même est la délivrance envoyée par le Père.
Pour aller plus loin, retrouvez trois autres numéros :
« La vue non plus ne serait pas pour nous si désirable, si nous ne savions quel grand mal est la cécité ; la santé aussi est rendue plus précieuse par l’épreuve de la maladie, tout comme la lumière par le contraste des ténèbres et la vie par celui de la mort. Ainsi le Royaume céleste est-il plus précieux pour ceux qui connaissent celui de la terre; et plus il sera précieux, plus nous l’aimerons. »
Saint Irénée de Lyon, Contre les hérésies (188), Livre IV, 22,2, « Sources chrétiennes », Paris : Cerf, 1969.
On vous propose de suivre des cours aux Bernardins