La Résurrection du Christ peut-elle vraiment avoir eu lieu ? Qu'en pensent les différents théologiens et historiens ?
Chaque année à Pâques, les orthodoxes russes chantent « Pâques nouvelle et sainte », par exemple dans la sublime église de la Transfiguration à Kiji, une île du lac Onega dans le nord de la Russie.
Or sur le tard, [la nuit] du sabbat, alors que la journée commençait à poindre vers le premier [jour] de la semaine, Marie de Magdala et l’autre Marie vinrent pour voir le sépulcre et voici qu’un grand ébranlement survint car un ange du Seigneur descendu du ciel roula la pierre et il se tenait assis dessus. Son aspect était comme l’éclair et son vêtement blanc comme neige. Effrayés par lui, les gardes furent pris de tremblement et devinrent comme morts. Répondant, l’ange dit aux femmes :
— Cessez d’avoir crainte, je sais que vous cherchez Jésus, le crucifié. Il n'est pas ici car il est ressuscité, comme il l'avait dit. Venez voir le lieu où il gisait. Et vite allez dire à ses disciples [qu']il est ressuscité d'entre les morts et voici il vous précède en Galilée. C'est là que vous le verrez. Voici, je vous l'ai dit.
Partant vite du tombeau avec crainte et grande joie elles coururent faire l'annonce à ses disciples. Or comme elles allaient faire l'annonce à ses disciples, voici Jésus vint à leur rencontre en disant :
— Réjouissez-vous !
S'étant approchées elles lui saisirent les pieds et l'adorèrent. Alors Jésus leur dit :
— Cessez d'avoir crainte, allez faire l'annonce à mes frères qu'ils aillent en Galilée. Là ils me verront.
Jésus-Christ a vraiment existé et il est mort sur la croix. Les historiens sérieux ne le contestent plus.
Mais est-il vraiment ressuscité ? Voilà la seule question qui compte pour celui qui écoute ce récit. Car alors, tous les autres miracles seraient peu de choses par rapport à un tel événement. Cette question se pose à tout homme et chacun doit y répondre personnellement.
Le fameux penseur catholique Jean Guitton, de l’Académie française, propose une réflexion intéressante sur ce sujet dans son livre Jésus (1956) :
« Si essentielle que soit la proclamation de la résurrection, le christianisme ne l’étale pas. On pourrait dire au contraire qu’il lui donne, dans tous les textes, le minimum de place. Les récits d’un événement si important pour la foi donnent l’impression d’avoir été écourtés au-delà de toute mesure ! […] Le contraste entre l’importance considérable du dogme, l’intérêt que tous y portaient, et la concision des traces que les chrétiens en ont laissées dans leurs textes donne beaucoup à réfléchir. La longueur, l’exagération, la couleur, sont chez l’homme en raison inverse de sa certitude. De fait, quand on sait, pourquoi s’étendre ? »
Le constat de Guitton est juste : dans l'évangile selon saint Matthieu :
Jésus Christ est proclamé Dieu fait homme. Il s’est laissé condamner et tuer sur la croix. Mourant dans son humanité, il descend jusqu’aux enfers où l’homme était enfermé depuis le péché d'Adam et Ève.
La résurrection du Christ est pour les croyants cette espérance folle : la mort est vaincue par la Vie, puisque Dieu libère la création des enfers. Et l’homme peut cesser comme Stig Dagerman, célèbre existentialiste suédois, « de craindre que sa vie soit une errance absurde vers une mort certaine. » *Essai Notre besoin de consolation est impossible à rassasier, 1952.
Une très vieille homélie anonyme de la vigile de Pâques* décrit cette descente du Christ aux enfers :
« Adam, en tant que premier père et premier créé de tous les hommes, et en tant que premier mortel, lui qui avait été tenu captif plus profondément que tous les autres, et avec le plus grand soin, il entendit le premier le bruit des pas du Seigneur, qui venait vers les prisonniers. Et il reconnut la voix de celui qui cheminait dans la prison, et, s’adressant à tous ceux qui étaient enchaînés avec lui depuis le commencement du monde, il parla :
— J’entends les pas de quelqu’un qui vient vers nous !
Et pendant qu’il parlait, le Seigneur entra, tenant les armes victorieuses de la croix. […] Et lui ayant saisi la main, il lui dit :
— Tiens-toi debout, toi qui dormais, lève-toi d’entre les morts, et le Christ t’illuminera. Je suis ton Dieu et, à cause de toi, je suis devenu ton Fils. Lèves-toi, toi qui dormais car je ne t’ai pas créé pour que tu séjournes ici enchaîné dans l’enfer. Surgis d’entre les morts, je suis la Vie des morts. Lève-toi, toi l’œuvre de mes mains, toi, mon effigie, qui a été faite à mon image […] Regarde sur mon visage les crachats que j’ai reçus pour toi, afin de te replacer dans l’antique paradis. Regarde sur mes joues la trace des soufflets que j’ai subis pour rétablir en mon image ta beauté détruite. Regarde mes mains qui ont été solidement clouées au bois, à cause de toi, qui autrefois a mal étendu tes mains vers le bois. […]
Lève-toi et partons d’ici, de la mort à la vie, des ténèbres à la lumière éternelle. Levez-vous et partons d’ici et allons de la douleur à la joie, des chaînes à la liberté, de la captivité aux délices du paradis, de la terre au ciel. Mon Père céleste attend la brebis perdue, un trône de chérubin est prêt, les porteurs sont debout et attendent, la salle des noces est préparée. Les trésors de tout bien sont ouverts, le royaume des cieux qui existait avant tout les siècles vous attend. »
*Pseudo-Épiphane, Homélie pour le Samedi Saint, cité selon Hans Urs von Balthasar, Dieu et l’homme d’aujourd’hui (1956).