Que fait Marie lors des noces de Cana ? Pourquoi Jésus ne fait-il pas le miracle tout seul ? Réponse avec de l'eau et du vin !
Le premier miracle de Jésus à Cana n'a pas fini d'inspirer les artistes ! Dans cette composition écrite par le grand pianiste et guitariste brésilien Egberto Gismonti, c'est une ode à deux voix, mêlant piano et harmonica qui vient célébrer l'eau et le vin (Agua e vinho pour les lusophones aguerris).
Ce magnifique enregistrement vous plonge au cœur de ce concert de 2017 donné au Centro Cultural Nestor Kichner de Buenos Aires en Argentine. Et c'est sublime.
Après avoir parlé de la transformation de l'eau en vin et de la petite explication en famille entre Jésus et Marie, nous relisons ce texte du premier miracle de Jésus lors des noces de Cana.
Le troisième jour, il y eut des noces à Cana de Galilée, et la mère de Jésus y était. Jésus aussi fut invité à ces noces avec ses disciples.
Le vin venant à manquer, la mère de Jésus lui dit :
— Ils n’ont pas de vin.
Jésus lui répondit :
— Que me veux-tu, femme ? Mon heure n’est pas encore venue.
Sa mère dit aux servants :
— Tout ce qu’il vous dira, faites-le.
Or, il y avait là six jarres de pierre, destinées aux purifications des Juifs, et contenant chacune deux ou trois mesures.
Jésus leur dit :
— Remplissez d’eau ces jarres.
Ils les remplirent jusqu’au bord.
Il leur dit :
— Puisez maintenant et portez-en au maître du repas.
Ils lui en portèrent.
Lorsque le maître du repas eut goûté l’eau devenue vin – et il ne savait pas d’où il venait, tandis que les servants le savaient, eux qui avaient puisé l’eau – le maître du repas appelle le marié et lui dit :
— Tout homme sert d’abord le bon vin et, quand les gens sont ivres, le moins bon. Toi, tu as gardé le bon vin jusqu’à présent !
Tel fut le commencement des signes que fit Jésus à Cana de Galilée et il manifesta sa gloire et ses disciples crurent en lui.
Lors du premier « miracle » de la vie publique du Christ, il y a Marie, sa mère. Et à bien y regarder, c'est déjà un indicateur important. Parce qu'elle n'est pas si souvent présente dans les récits évangéliques.
Il s’agit d’un épisode remarquable à bien des égards :
C’est donc intéressant de souligner que dans ce passage Jean est le seul à relater la présence de Marie auprès de Jésus adulte.
Dans l’évangile de Jean, Marie apparaît à deux moments :
Ce n'est pas le seul élément qui rend cet épisode unique :
Ils n’avaient pas de vin, car le vin des noces était épuisé. La mère de Jésus lui dit :
— Ils n’ont pas de vin. (Jn 2,3)
C’est Marie qui remarque un manque et en fait part à son fils.
Nous vous avions déjà expliqué ailleurs (petit aide-mémoire juste ici) comment Jésus prenait de la distance avec la demande de sa mère et pourquoi.
Mais revenons sur l'intercession de Marie et sa réaction. En effet, Marie se fait apparemment un peu calmer par son fils. Et pourtant…
« Tout ce qu’il vous dira faites-le » (Jn 2,5)
C’est la parole que Marie adresse aux servants. Cette recommandation témoigne de la confiance inconditionnelle que Marie accorde à Jésus, qui pourtant vient apparemment de la rabrouer !
Au moment de la conception de Jésus, Marie avait de même répondu : « Ce que tu me dis, que cela se fasse » (Lc 1,38).
Marie est donc la première à faire ce qui lui était dit : c’est pourquoi elle peut transmettre cette parole à d’autres.
Marie est la première à ouvrir la voie et devient la première à montrer la voie.
Jésus leur dit :
— Remplissez d’eau ces jarres.
Ils les remplirent jusqu’au bord. Il leur dit :
— Puisez maintenant et portez-en au maître du repas. (Jn 2, 7-8)
Chacun des deux ordres formulés par Jésus est immédiatement exécuté. Cela révèle l’identité de Jésus comme maître. Mais ce qui est particulièrement remarquable, c’est que Jésus associe les servants à son miracle.
Cette manière d’opérer indique la volonté que Dieu a de faire participer l’homme : par Marie, la parole du Christ appelle les serviteurs à collaborer avec lui pour produire ce miracle.
C'est là ce que signale magnifiquement le tableau de Carl Bloch ci-dessous, montrant les servants au premier plan tandis que Jésus se tient presque caché au fond.
Pour conclure en beauté, reprenons les magnifiques mots du poème de Jean-Pierre Lemaire, qui fait résonner en profondeur et en simplicité le sentiment des servants de Cana, tout honorés de participer mystérieusement à ce miracle :
Nous versons de nouveau le vin dans les coupes
et les gens sont heureux, les mariés sereins,
sans ombres au visage. Nous n’en buvons pas
mais nous savons qu’il vient des jarres de pierre
où l’eau a changé de couleur et de goût.
Le maître et sa mère au bout de la table
le savent mieux que nous. En les voyant sourire,
nous devinons le cours secret de la rivière
qui remplit les coupes, la vigne cachée,
et nous savourons cette complicité
comme notre part, la meilleure peut-être.
Jean-Pierre Lemaire, « Les servants de Cana », Le pays derrière les larmes, Paris, Gallimard Poésie, NRF, 2016 ; p. 336
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