Quel est le symbole de la pomme dans la Bible ? Est-elle un symbole d'érotisme, d'amour ou de péché ? Réponse avec PRIXM !
Dans Siffler sur la colline, méga-tube des années 70, Joe Dassin reprend presque mot pour mot un motif poétique du Cantique des Cantiques, le plus célèbre poème d'amour de la Bible. Voilà ce que chante le grand Joe :
« Je voudrais être une pomme suspendue à un pommier
Et qu'à chaque fois qu'elle passe elle vienne me mordre dedans »
Pourquoi la pomme est-elle une image si importante de la poésie érotique ? On vous l'explique dans l’éclairage.
Ne vous épargnez pas la lecture du texte biblique, il est court. Et beau.
Le Cantique des Cantiques est une suite de dialogues amoureux. Ici, la fiancée évoque son fiancé.
Tel un pommier parmi les arbres de la forêt,
Voici mon amoureux parmi les garçons.
À son ombre, que j'ai tant désirée, je me suis assise...
Son fruit est doux à mon palais.
Il m’a menée à la maison du vin,
Et son étendard au-dessus de moi, c'est l'amour.
C'est un livre de l'Ancien Testament, un recueil de poèmes amoureux, dont nous avions déjà parlé.
Si besoin était, ces poèmes nous rappellent que l’Écriture n’est pas un recueil d’histoires moralisantes et sans souffle.
Le Cantique des Cantiques présente le chant de l’amour d’un homme vers sa femme et la réponse tout aussi passionnée de la femme à son amant. C’est un dialogue entre deux amoureux, tout simplement magnifique. On se penche sur les éléments de ce poème.
On nous parle de « pommier » et ce n’est pas anodin. C’est même très symbolique, pour au moins deux raisons qui tiennent au contexte de l’époque et de la région où a été écrit ce texte, le Proche-Orient antique :
Ces usages de la pomme permettent d'imaginer sa charge symbolique pour les lecteurs anciens du Cantique : à la récitation de ce poème, ils entendent que l’amour est un parfum qui guérit et un élan vital, d'une inaltérable bonté.
Dans la scène du film Rio ne répond plus avec Jean Dujardin, la pomme d’amour reflète l’ambivalence symbolique de ce fruit, comme étant :
Au fil des Écritures, le vin — malgré ses dangers soulignés dans l'épisode de l'ivresse de Noé, au tout début — acquiert une dimension divine, d’ouverture à la communion et à la joie, à une ivresse signe de l’au-delà.
De siècle en siècle, les générations successives ont lu ces poèmes sublimes — qu’il n’est pas inutile de se fredonner en couple de temps en temps. Et ces innombrables lectures ont donné des interprétations intéressantes sur l’identité des deux amants du Cantique.
Depuis des siècles, les interprètes et théologiens juifs et chrétiens se sont posé la question suivante : qui sont ces amoureux et que symbolisent-ils ? Pourquoi le poème érotique a-t-il toute sa place dans la Bible ? Plusieurs interprétations sont possibles. Voici les principales manières d’aborder ce texte sublime :
Même si ce n'est pas très « gender-ly correct », dans la tradition théologique, la distinction entre l'homme et la femme du Cantique des Cantiques renvoie à la distinction entre Dieu (masculin) et l'âme du croyant (féminine) qui reçoit Dieu. Paul Evdokimov a écrit des lignes magnifiques sur le sujet :
« Conquérant, aventurier, constructeur, l’homme n’est pas paternel dans son essence. Ce fait a une portée immense : il explique pourquoi le principe religieux de dépendance, de réceptivité, de communion, s’exprime plus immédiatement par la femme […] La Bible érige la femme en organe de réceptivité spirituelle de la nature humaine. En effet, la promesse du salut a été donnée à la femme, c’est elle qui reçoit l’Annonciation, c’est à elle que le Ressuscité apparaît le premier, c’est la femme habillée de soleil qui figure l’Église et la Cité céleste dans l’Apocalypse. De même c’est l’image de l’Épouse et de la Fiancée que Dieu choisit entre toutes pour exprimer son amour envers l’homme et la nature nuptiale de sa communion. Et enfin le plus décisif ; l’Incarnation s’accomplit dans l’être féminin de la Vierge qui lui donne sa chair et son sang.
À la paternité divine comme qualificatif de l’être de Dieu, répond directement la maternité féminine comme spécificité religieuse de la nature humaine, sa capacité réceptive du divin. La fin de la vie chrétienne est de faire de tout être humain une mère, prédestiné au mystère de la naissance : « afin que le Christ soit formé en vous ».
Paul Evdokimov, Sacrement de l’amour, Le mystère conjugal à la lumière de la tradition orthodoxe, Éditions de l’Epi, Paris, 1962