Jésus est accusé et emmené devant Pilate, le gouverneur romain. Comment se passe l'audience ? Quelle est l'atmosphère ou la tension du moment ?
Kanye West, légende du rap états-unien, tape du poing sur la table dans un morceau au rythme militaire, Jesus walks :
« Ils disent que qu'on peut rapper sur n'importe quel sujet sauf Jésus. Ce qui veut dire armes, sexe, mensonges, cassettes vidéo mais si je parle de Dieu mon disque ne sera pas joué ; c'est ça ? Eh bien tant pis si ça ne sera pas beaucoup joué en radio, ce qui entraînera sûrement une réduction de mes fins de mois. Mais j'espère que ça me lavera de mes péchés »
Avec PRIXM, pas de tabou : on marche avec Kanye West et on parle de Jésus !
*Avant les prises de position nauséabondes de Kanye West, qui ont provoqué chez nous autant de tristesse que de colère, on appréciait et même on admirait une partie de son œuvre qui était totalement dénuée des déclarations que nous découvrons ces derniers temps. Nous avions donc analysé ses œuvres que nous continuons à interpréter, tout en dénonçant ses propos insupportables.
Après avoir été arrêté et interrogé par les grands prêtres, Jésus est conduit devant le gouverneur romain.
Quant à Jésus, il se tint debout devant le gouverneur et le gouverneur l’interrogea :
— Tu es le roi des Juifs ?
Jésus lui déclara :
— Tu le dis.
Et tandis que les grands prêtres et les anciens l’accusaient il ne répondit rien. Alors Pilate lui dit :
— Est-ce que tu n’entends pas de combien de choses ils témoignent contre toi ?
Mais il ne répondit pas à un seul mot, si bien que le gouverneur s'étonna à l'extrême. À chaque fête, le gouverneur avait coutume de relâcher à la foule un prisonnier, celui qu’ils voulaient. Ils avaient alors un prisonnier fameux, nommé Jésus Barabbas. Comme ils étaient rassemblés, Pilate leur dit :
— Lequel voulez-vous que je vous relâche ? Jésus Barabbas ou Jésus qui est dit Christ ?
[...] Les grands prêtres et les anciens persuadèrent les foules de réclamer Barabbas et de faire supprimer Jésus. [...]
Pilate leur dit :
— Que ferai-je donc de Jésus dit Christ ?
Tous lui disent :
— Qu’il soit crucifié !
Mais le gouverneur rétorqua :
— Qu’a-t-il donc fait de mal ?
Eux de plus belle criaient en disant :
— Qu’il soit crucifié !
Voici l'éclairage au travers de ce chef-d’œuvre du Tintoret. Prenez le temps de le contempler...
Le peintre cristallise un moment de basculement total et de tensions, pour transporter les spectateurs de son tableau au-delà du récit.
Remarquons ce cadre architectural lourd et écrasant. En plus d’être un exercice de style pour le peintre, il semble étouffer tout espoir :
L’élément central de la composition est le broc d’eau, qui permet à Pilate de se « laver les mains » de cette accusation. Par son regard fuyant, il refuse d’assumer la responsabilité de cette exécution. Responsabilité qui lui incombe pourtant, puisqu'il est le préfet, doté de toute l'autorité politique locale.
Si le spectateur regarde le tableau d'un peu en bas, Pilate semble le chercher du regard, comme pour l'interroger : que faire de cet Homme en blanc placé au milieu de nous ?
Seul debout, Jésus se dresse dans son long manteau blanc qui accroche la lumière. Il tranche sur tout le reste de la scène par la détermination et la sérénité qu’il rayonne. Il est vraiment l'Emmanuel, Dieu-avec-nous !
Mais il est aussi pieds et torse nus, les mains liées repliées sur le ventre : il reste profondément humain, vulnérable et démuni. Le Christ expose son abandon aux yeux de tous. La blancheur de pureté du drap qui le recouvre sera bientôt tâchée de sang. Et la figure illuminée du Juste n’est regardée par personne.
Boèce, philosophe romain du VIe siècle, fut lui aussi un « juste persécuté », victime d'un pouvoir politique injuste. Son attitude face à la persécution est admirable, mais celle de Jésus est vraiment divine : lui, Il ne « méprise » pas l'armée des scélérats, mais Il s'apprête à lui offrir le pardon !
« Tu ne dois pas t’étonner si sur cet océan qu’est la vie, les ouragans nous assaillent et nous malmènent, à partir du moment où nous nous proposons principalement de déplaire aux scélérats. L’armée qu’ils constituent a beau faire nombre, elle n’en est pas moins méprisable car elle n’a pas de chef et elle s’abandonne à l’ignorance, qui la livre aux caprices du hasard. »
Boèce, Consolation de Philosophie, Livre 1,6. Traduit du latin par Colette Lazam, Paris : Rivages, 1989