Découvrez l'épisode de la Cène dans la Bible ! Pourquoi Jésus transforme le pain et le vin en corps et en sang ?
Dans Indiana Jones et la Dernière Croisade (Steven Spielberg, 1989), Harrison Ford et son ennemi nazi, doivent trouver parmi une multitude de coupes celle de la Cène de Jésus-Christ : est-elle d'or et de pierres précieuses ou de terre cuite ?
Nous vous proposons de suivre la Passion du Christ pas à pas dans l'Évangile de Matthieu. Pour cet épisode, nous vous présentons le texte de la Cène, le dernier repas que Jésus prend avec ses disciples et qui a fondé le mémorial eucharistique que les chrétiens célèbrent chaque dimanche.
Comme ils mangeaient Jésus prit du pain, le bénit, le rompit et le donna à ses disciples et dit :
— Prenez et mangez, ceci est mon corps.
Et prenant une coupe il rendit grâces et leur donna, disant :
— Buvez-en tous car ceci est mon sang, [celui] de l’alliance répandu pour beaucoup en rémission des péchés. Je vous dis : Je ne boirai plus désormais de ce produit de la vigne jusqu’à ce jour où je le boirai nouveau avec vous dans le royaume de mon Père.
Le monde hérité de l'Ancien Testament dans lequel a évolué Jésus ne pense pas avec des concepts mais se plonge en permanence dans ce que la vie a de plus concret. C'est ainsi qu'il faut lire les Évangiles : percevoir d'abord le sens très concret qui émerge des textes, avant d'en discerner la puissance symbolique.
Or, au moment de la Cène, Jésus dit séparément :
« Ceci est mon corps » et « Ceci est mon sang ».
Un corps séparé de son sang est un corps qui ne vit plus. Quand il donne son corps et son sang à ses disciples, Jésus leur donne déjà sa vie, comme il la donnera le lendemain de la Cène sur la croix.
Dans la culture juive de l'époque, le sang est le signe suprême de la vie. C’est pour cela que, dans le monde juif, le sang n’appartient qu’à Dieu, puisque pour les juifs, la vie est entre les mains de Dieu. L’homme doit donc s’abstenir de mettre la main sur un liquide d’une telle pureté, pour ne pas se « brûler » et devenir impur.
On doit donc saigner sa viande pour la manger et la cuisson empêche de déguster un steak bien rouge, encore aujourd’hui au Moyen-Orient (cette vision du sang est également présente dans le monde musulman).
Jésus, puisqu’il est Dieu, peut donner son sang à boire. Il a l’autorité nécessaire pour donner le signe de la vie. Dès lors, le rapport de l’homme à Dieu et de l’homme à la vie est totalement changé : puisque l’homme a accès à Dieu en buvant Son sang.
Il peut non seulement déguster une côte de bœuf bien rouge, mais il n’est plus dans la crainte de souiller ses mains avec des éléments qui ne sont réservés qu’à Dieu, puisque Dieu s’offre tout entier à lui.
En offrant son corps et son sang, Jésus détruit les barrières entre l’homme et Dieu, il efface la séparation du pur et de l’impur. Cela opère un bouleversement radical, qui a des conséquences culturelles dépassant bien évidemment le cadre des cuisines.
Ce tableau devait s’appeler Cène mais le tribunal de l’Inquisition demande à Véronèse de supprimer les personnages peints qui ne sont pas présentés par le récit de l’Évangile. On aperçoit notamment un oiseau et deux fantassins qui s’abreuvent.
Véronèse refuse et renomme son tableau Le repas chez Lévi. Sa réponse est restée célèbre : « Nous les peintres, nous prenons des libertés tout comme les poètes et les fous. »
On a éludé la question difficile et mystérieuse : comment, pendant la Cène, du pain et du vin peuvent-ils être en même temps un corps (et quel corps) et du sang (et quel sang) ?
Pascal n’a pas tout dit dans ses Pensées, mais quand même :
« Comme Jésus-Christ est demeuré inconnu parmi les hommes,
ainsi sa vérité demeure parmi les opinions communes,
sans différence à l’extérieur. Ainsi l’Eucharistie* parmi le pain commun » (n° 789).
* Dans la tradition chrétienne, le mot Eucharistie (qui vient du grec euxaristos signifiant merci ou rendre grâces) a peu à peu pris le sens de corps ou de sang du Christ.
Blaise Pascal, Pensées, n°789, 1669, France