L’épisode biblique du sacrifice d'Isaac est repris dans le Coran. Il est fêté par les Musulmans le jour de l'Aïd el-Kebir. Que raconte le Coran ?
Raymond Devos revisite le texte de la ligature d'Isaac dans un sketch mémorable Le fils d'Abraham ou l'appel du peuple.
La Genèse est le premier des cinq « livres de Moïse » et offre à son lecteur une réflexion anthropologique. La thématique qui parcourt l’ensemble du récit concerne les relations fondatrices de l’être humain. L’historien ne peut pas dire grand-chose sur l’historicité des personnages et des faits relatés dans la Genèse. Les sources anciennes connues par ailleurs sont muettes sur les faits que raconte ce livre.
Dieu mit au test Abraham. Il lui dit :
— Prends, je te prie, ton fils ton unique que tu aimes Isaac et va-t’en vers la terre du Morîyâ et fais-le monter là pour un holocauste sur une des montagnes que je te dirai […]
Et ils arrivèrent au lieu que Dieu lui avait dit
Et Abraham construisit là l’autel et il disposa le bois
Et il lia Isaac son fils
Et le plaça sur l’autel par-dessus le bois
Et Abraham étendit la main et il prit le couteau pour immoler son fils
Et l’ange messager du Seigneur l’appela du ciel et il dit :
— Abraham Abraham !
Et il dit :
— Me voici.
Et il dit :
— N’étends pas la main vers le garçon et ne lui fais rien. Oui maintenant je sais que tu es un craignant Dieu et tu ne m’as pas épargné ton fils, ton unique.
Le Coran, sourate 37, 102-109, évoque le sacrifice d’Abraham - ou plutôt d’Ibrahim (Abraham en arabe).
Contrairement au texte biblique qui évoque très clairement Isaac, il ne précise pas quel est le fils d’Abraham dont il est question - Isaac ou Ismaël. Tabari (historien et exégète perse du Coran de la fin du IXe s.) penchait pour Isaac, mais les traditions populaires ont fini par choisir Ismaël, fils premier-né d’Abraham et vénéré comme l’ancêtre des Arabes.
Abraham est une figure patriarcale majeure de la Bible que le Coran a repris dans ses textes. Le Coran est ainsi tissé de références bibliques qu’il interprète et conjugue avec la réalité historique de son époque.
L’islam célèbre le sacrifice d’Abraham avec la fête de l’Aïd al-Adha (« fête du mouton ») ou Aïd el-Kebir (« grande fête ») qui clôture le pèlerinage à La Mecque, le dixième jour du dhû al-hi- jja (dernier mois lunaire du calendrier musulman).
À La Mecque même, et partout dans le monde, on y immole un animal en souvenir du geste de soumission d’Abraham, lors de l’épisode du « non- sacrifice » du fils.
La bête immolée est ensuite consommée par les membres de la famille et les amis. Une part est réservée pour le partage avec les plus défavorisés. Cette fête clôt le cycle annuel des fêtes de l’Islam.
Toute l’humanité s’est posé cette question : pourquoi Dieu demande-t-il à Abraham de sacrifier son fils ? On se plaît à imaginer que ces lignes de Léon Chestov auraient pu donner une piste d'explication :
« Il n’apercevait ni le soleil, ni le ciel, il ne voyait rien dans la vie, bien qu’il eût tout devant les yeux. Et lorsque arriva la mort, il comprit subitement qu’il n’avait rien vu […]. Tout ce qu’il avait pu voir de vrai, il l’avait vu durant son enfance, sa jeunesse, puis l’avait oublié, employant toutes ses forces uniquement à ne pas être lui-même, mais à être comme "tout le monde". Aussi la révélation de la mort n’est pas une négation de la vie, mais, au contraire, plutôt une affirmation – mais une affirmation d’autre chose que de cet habituel remue-ménage de souris par lequel se laissent prendre les hommes. »
Léon Chestov, Sur la balance de Job. Pérégrinations à travers les âges, 1923
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