L'Ascension de Jésus-Christ : mais que s'est-il passé en vrai ?

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L'Ascension de Jésus est le moment où il « monte au ciel » une fois ressuscité. Mais qu'est-ce que cela veut dire ? Est-un récit légendaire ? Que s'est-il vraiment passé ?

4 minutes et 53 secondes avec Rousseau, Biber (mais pas Justin), Il Garofalo, Le Pérugin et Salvador Dalí
Dernière mise à jour -  
20/9/2023

Deux salles deux ambiances, mais l'Ascension pour tous !

Craquez pour du Gospel en écoutant l’émouvante Mahalia Jackson interpréter In the Upper Room [« Dans la chambre haute », allusion au lieu de la prière des disciples après l’Ascension].

Ou jouez-la plus classique avec la Sonate du Rosaire XII, sonate pour l’Ascension, composée par Heinrich (un postiche) Ignaz Franz von Biber (1644-1704) et interprétée ici par l’ensemble La Tempesta.

Le texte biblique qui raconte l'Ascension de Jésus-Christ

On se penche ici sur l’épisode de l’Ascension qui se situe à la fin du cycle des apparitions du Christ ressuscité.

Théophile, j’ai raconté dans le premier livre tout ce que Jésus a commencé à faire et à enseigner jusqu’au jour où — après avoir donné par l’Esprit Saint ses ordres aux apôtres qu’il avait choisis — il fut enlevé. C’est à eux aussi qu’après sa Passion il se montra vivant, avec force preuves, leur apparaissant pendant quarante jours et parlant du royaume de Dieu. Comme il mangeait avec eux, il leur enjoignit de ne pas s’éloigner de Jérusalem mais d’attendre ce que le Père avait promis : ce que vous avez appris par ma bouche : que Jean a baptisé d’eau, mais que vous, sous peu de jours, vous serez baptisés de l’Esprit Saint.

Ceux qui s'étaient réunis l'interrogeaient disant :

Seigneur est-ce en ce temps-ci que tu vas rétablir le royaume d'Israël ?

Or il leur dit :

— Ce n’est pas à vous de connaître les temps ni les moments que le Père a fixés de sa propre autorité. Mais lorsque le Saint Esprit descendra sur vous, vous recevrez de la force et vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’à l’extrémité de la terre.

A ces mots, il s'éleva sous leur regard et un nuage le déroba à leurs yeux. Et comme ils regardaient le ciel avec attention pendant qu’il s’en allait voici que deux hommes vêtus de blanc se présentèrent à eux et dirent :

— Hommes de Galilée pourquoi restez-vous à regarder vers le ciel ? Ce Jésus qui, d’auprès de vous, a été enlevé au ciel, viendra de la même manière que vous l’avez vu s’en aller au ciel.

Ils retournèrent alors à Jérusalem, de la montagne appelée des Oliviers, qui est près de Jérusalem à la distance du parcours d’un jour de sabbat. Et quand ils furent entrés ils montèrent à la chambre haute où ils se tenaient : Pierre et Jean, Jacques et André, Philippe et Thomas, Barthélemy et Matthieu, Jacques d’Alphée et Simon le Zélote et Jude de Jacques. Tous ceux-là d’un même cœur étaient assidus à la prière avec des femmes dont Marie, la mère de Jésus, et avec ses frères.

Chapitre 1, versets 1 à 14 des Actes des Apôtres dans le Nouveau Testament. Traduit du grec par les équipes du programme de recherches La Bible En Ses Traditions

L'Ascension de Jésus-Christ après sa Résurrection

Gustave Doré (1832-1883), L'Ascension (1879, huile sur toile, 61 x 42 cm), Petit Palais, Paris (France). Domaine public.

On reproche parfois au Nouveau Testament d’avoir les traits d’un récit légendaire : des aveugles qui retrouvent la vue, des morts qui ressuscitent, des boiteux qui marchent. Pourquoi pas un homme qui serait enlevé au ciel dans la nuée ? Alors interrogeons-nous sur ce texte aux accents apparemment légendaires.

Le thème de l’ascension est-il fréquent dans l’Antiquité ?

  • Notre passage se distingue nettement des « voyages de l’âme » ou des « visions célestes », thèmes fréquents dans de nombreux textes anciens, y compris dans la Bible. Dans aucun de ces cas il ne s’agit d’ascension corporelle comme c’est le cas pour l’Ascension du Christ.

  • Bien sûr, la tradition grecque classique évoque des héros mythiques enlevés au ciel : par exemple Héraclès-Hercule, que Zeus son père retira du bûcher pour le conduire à l’Olympe. Mais ces personnages n’ont pas de caractère historique comme Jésus.

Le thème de « l’ascension » n’est donc pas absent de l’imaginaire antique, mais l’ascension corporelle d’un personnage historique semble être une rareté.

Manuscrit des Très Riches Heures du duc de Berry, folio 184 : L'Ascension du Christ (15ème siècle, enluminure, 29 x 21 cm), Musée Condé, Chantilly (France). Domaine public.

Le motif de l'ascension a-t-il des précédents dans la Bible ?

  • L’ascension de Jésus rappelle la fin de la vie du prophète Élie dans le deuxième livre des Rois dans l’Ancien Testament (2R 2,1-14). Comme Elie, Jésus est enlevé au ciel et ses disciples « voient » cet enlèvement. Cela marque le début d’une nouvelle période : Jésus n’est plus sur terre et ce sont désormais les apôtres qui sont les responsables de la communauté. L’Ascension garantit donc qu’aucun homme ne pourra se faire passer pour Jésus !
  • Le texte utilise également un terme biblique loin d’être anodin : la nuée. Dans la Bible, ce « brouillard » est souvent le signe de la présence de Dieu en même temps que de son inconnaissabilité. Par exemple, la nuée joue un grand rôle au moment du passage de la mer Rouge (Exode 13-14). Alors si le lecteur moderne ne comprend pas comment l’Ascension est possible, la Bible tient à le rassurer : la nuée est le signe de l’inconnaissabilité de Dieu, en gros il ne faut pas forcément chercher à tout comprendre.

Là où le lecteur contemporain veut évaluer le réalisme historique d’un tel événement (« comment est-ce possible ? »), l’auteur décrit une réalité divine, le trait d’union dessiné par Jésus entre ce monde-ci, le nôtre, et ce monde-là, celui de Dieu, au-delà de tout ce qui est sensible ou imaginable. Il le fait en utilisant des expressions symboliques.

Le Pérugin (1446-1523), L'Ascension du Christ en présence de la Vierge et des apôtres (huile sur bois transposée sur toile, 1496-1500), Musée des Beaux-Arts, Lyon (France). Domaine public.

Ce texte a-t-il été écrit pour convaincre des ignorants ou des esprits faibles ?

Comme le montrent le style et la qualité de la langue utilisée dans notre texte, les Actes des Apôtres sont destinés à des esprits critiques, capables de vérifier.

L’auteur, Luc, écrit pour un public cultivé, qu’il invite à la réflexion, à « juger des renseignements reçus ». En racontant l’ascension de Jésus, il ne cherche nullement à impressionner quelques esprits faibles !

Quel poids historique donner au récit de l'Ascension ?

En parlant à ceux qui sont présents juste avant son Ascension, Jésus les qualifie de témoins. Il existe deux termes grecs que l’on traduit en français par témoin : soit autoptês, soit martus.

  • Martus désigne celui qui donne un témoignage, par exemple devant un tribunal, éventuellement par le don de la vie, d’où le terme « martyr ».

Le moment de l’Ascension devient un des fondements du témoignage des apôtres, qui ira jusqu’au martyre. Ils seront très nombreux à donner leur vie au nom de leur foi dans les années qui suivront. Cela n’atteste pas la réalité de l’Ascension, mais ça lui donne un peu de poids quand même…

Salvador Dali (1904-1989), L'Ascension du Christ, Piétà (huile sur toile, 1958) © Collection Pérez Simon, Mexico (Mexique).

Alors, peut-on y croire ?

Personne ne pourra prouver que le récit de l’Ascension est une légende ni, au contraire, un récit historique minutieux. Il aurait fallu filmer la scène, mais la vidéo n’existait pas à l’époque - et encore, on pourrait toujours crier au montage.

Cela suscite deux réflexions :

  • Comme tous les miracles dans l’Écriture, l’Ascension dérange notre raison. L’Ascension peut-être encore plus que les autres.
  • Mais au fond, si l’on croit que Dieu s’est fait homme et qu’il est ressuscité, pourquoi ne serait-il pas « monté au ciel » ?

Le mot de la fin

Jean-Jacques Rousseau dans son Émile aborde exactement ce thème de la foi en la parole des témoins :

« Dirons-nous que l’histoire de l’Évangile est inventée à plaisir ? Mon ami, ce n’est pas ainsi qu’on invente ; et les faits de Socrate, dont personne ne doute, sont moins attestés que ceux de Jésus-Christ. Au fond c’est reculer la difficulté sans la détruire ; il serait plus inconcevable que plusieurs hommes d’accord eussent fabriqué ce livre, qu’il ne l’est qu’un seul en ait fourni le sujet. […] l’Évangile a des caractères de vérité si grands, si frappants, si parfaitement inimitables, que l’inventeur en serait plus étonnant que le héros. »

Jean-Jacques Rousseau, Émile ou De l'éducation (1762), Paris : Garnier, 1961.

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