L'Ascension de Jésus est le moment où il « monte au ciel » une fois ressuscité. Mais qu'est-ce que cela veut dire ? Est-un récit légendaire ? Que s'est-il vraiment passé ?
Craquez pour du Gospel en écoutant l’émouvante Mahalia Jackson interpréter In the Upper Room [« Dans la chambre haute », allusion au lieu de la prière des disciples après l’Ascension].
Ou jouez-la plus classique avec la Sonate du Rosaire XII, sonate pour l’Ascension, composée par Heinrich (un postiche) Ignaz Franz von Biber (1644-1704) et interprétée ici par l’ensemble La Tempesta.
On se penche ici sur l’épisode de l’Ascension qui se situe à la fin du cycle des apparitions du Christ ressuscité.
Théophile, j’ai raconté dans le premier livre tout ce que Jésus a commencé à faire et à enseigner jusqu’au jour où — après avoir donné par l’Esprit Saint ses ordres aux apôtres qu’il avait choisis — il fut enlevé. C’est à eux aussi qu’après sa Passion il se montra vivant, avec force preuves, leur apparaissant pendant quarante jours et parlant du royaume de Dieu. Comme il mangeait avec eux, il leur enjoignit de ne pas s’éloigner de Jérusalem mais d’attendre ce que le Père avait promis : ce que vous avez appris par ma bouche : que Jean a baptisé d’eau, mais que vous, sous peu de jours, vous serez baptisés de l’Esprit Saint.
Ceux qui s'étaient réunis l'interrogeaient disant :
— Seigneur est-ce en ce temps-ci que tu vas rétablir le royaume d'Israël ?
Or il leur dit :
— Ce n’est pas à vous de connaître les temps ni les moments que le Père a fixés de sa propre autorité. Mais lorsque le Saint Esprit descendra sur vous, vous recevrez de la force et vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’à l’extrémité de la terre.
A ces mots, il s'éleva sous leur regard et un nuage le déroba à leurs yeux. Et comme ils regardaient le ciel avec attention pendant qu’il s’en allait voici que deux hommes vêtus de blanc se présentèrent à eux et dirent :
— Hommes de Galilée pourquoi restez-vous à regarder vers le ciel ? Ce Jésus qui, d’auprès de vous, a été enlevé au ciel, viendra de la même manière que vous l’avez vu s’en aller au ciel.
Ils retournèrent alors à Jérusalem, de la montagne appelée des Oliviers, qui est près de Jérusalem à la distance du parcours d’un jour de sabbat. Et quand ils furent entrés ils montèrent à la chambre haute où ils se tenaient : Pierre et Jean, Jacques et André, Philippe et Thomas, Barthélemy et Matthieu, Jacques d’Alphée et Simon le Zélote et Jude de Jacques. Tous ceux-là d’un même cœur étaient assidus à la prière avec des femmes dont Marie, la mère de Jésus, et avec ses frères.
On reproche parfois au Nouveau Testament d’avoir les traits d’un récit légendaire : des aveugles qui retrouvent la vue, des morts qui ressuscitent, des boiteux qui marchent. Pourquoi pas un homme qui serait enlevé au ciel dans la nuée ? Alors interrogeons-nous sur ce texte aux accents apparemment légendaires.
Le thème de « l’ascension » n’est donc pas absent de l’imaginaire antique, mais l’ascension corporelle d’un personnage historique semble être une rareté.
Là où le lecteur contemporain veut évaluer le réalisme historique d’un tel événement (« comment est-ce possible ? »), l’auteur décrit une réalité divine, le trait d’union dessiné par Jésus entre ce monde-ci, le nôtre, et ce monde-là, celui de Dieu, au-delà de tout ce qui est sensible ou imaginable. Il le fait en utilisant des expressions symboliques.
Comme le montrent le style et la qualité de la langue utilisée dans notre texte, les Actes des Apôtres sont destinés à des esprits critiques, capables de vérifier.
L’auteur, Luc, écrit pour un public cultivé, qu’il invite à la réflexion, à « juger des renseignements reçus ». En racontant l’ascension de Jésus, il ne cherche nullement à impressionner quelques esprits faibles !
En parlant à ceux qui sont présents juste avant son Ascension, Jésus les qualifie de témoins. Il existe deux termes grecs que l’on traduit en français par témoin : soit autoptês, soit martus.
Le moment de l’Ascension devient un des fondements du témoignage des apôtres, qui ira jusqu’au martyre. Ils seront très nombreux à donner leur vie au nom de leur foi dans les années qui suivront. Cela n’atteste pas la réalité de l’Ascension, mais ça lui donne un peu de poids quand même…
Personne ne pourra prouver que le récit de l’Ascension est une légende ni, au contraire, un récit historique minutieux. Il aurait fallu filmer la scène, mais la vidéo n’existait pas à l’époque - et encore, on pourrait toujours crier au montage.
Cela suscite deux réflexions :
Jean-Jacques Rousseau dans son Émile aborde exactement ce thème de la foi en la parole des témoins :
« Dirons-nous que l’histoire de l’Évangile est inventée à plaisir ? Mon ami, ce n’est pas ainsi qu’on invente ; et les faits de Socrate, dont personne ne doute, sont moins attestés que ceux de Jésus-Christ. Au fond c’est reculer la difficulté sans la détruire ; il serait plus inconcevable que plusieurs hommes d’accord eussent fabriqué ce livre, qu’il ne l’est qu’un seul en ait fourni le sujet. […] l’Évangile a des caractères de vérité si grands, si frappants, si parfaitement inimitables, que l’inventeur en serait plus étonnant que le héros. »
Jean-Jacques Rousseau, Émile ou De l'éducation (1762), Paris : Garnier, 1961.
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