Étienne est un martyr chrétien, mis à mort et lapidé. Quelle est l'histoire d'Étienne dans la Bible ? Réponse avec le tableau de Rubens !
Étienne, dont on vous parle aujourd’hui, est le premier martyr de l’histoire chrétienne. En grec Étienne s’écrit Stéphanos qui a aussi donné Stéphane, Stephen, Steven…
Et là, ça fait tilt : « Ah c'est pour ça ! » qu'on appelle stéphanois les habitants de Saint-Étienne ou les joueurs des Verts (l’équipe de Platoche, Pascal Feindouno, Pierrick Aubameyang ou Yann M’Vila).
Autre fun fact, les noms de saints ont pas mal marqué la géographie française :
Bref, le gars dont on vous parle aujourd’hui pèse dans le game (saint Étienne, pas Yann M'Vila) !!
Étienne est un diacre charismatique qui prêche la parole de Dieu et s'attire les foudres de ce même sanhédrin qui avait condamné Jésus. A la suite d'un faux procès, il est condamné à la lapidation.
Mais, se trouvant rempli de l’Esprit saint, ayant regardé fixement vers le ciel, il vit la gloire de Dieu et Jésus debout à la droite de Dieu. Et il dit:
– Voici que je vois les cieux ouverts et le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu.
Ayant crié à pleine voix, ils se bouchaient les oreilles et ils se précipitèrent ensemble sur lui. Et, l’ayant traîné hors de la ville, ils le lapidaient. Et les témoins avaient déposé leurs manteaux aux pieds d’un jeune homme [dont le nom est] appelé Saul, et ils lapidaient Étienne priant et disant:
– Seigneur Jésus, reçois mon esprit...
Or, s’étant mis à genoux, il cria à pleine voix:
– Seigneur, ne leur impute pas ce péché !
Et, ayant dit cela, il s’endormit.
Au XVIème siècle, en plein mouvement de la Réformation catholique (grosse battle entre protestants et catholiques aux conséquences souvent dramatiques), l’archevêque de Milan déclara qu'il fallait : « saisir les âmes par tous les moyens en multipliant les images ».
On eut plus que jamais recours à la peinture pour frapper l’imaginaire par la beauté et par là transmettre les récits bibliques.
👉 Quand au XVIIème siècle Rubens peint cette peinture, élément d'un triptyque, il s'inscrit dans ce mouvement.
Bon, ce n’était pas nouveau : on n’avait pas attendu la Réformation catholique pour recouvrir les églises byzantines ou romanes de fresques, de mosaïques et peindre des icônes. On a toujours conçu des églises, en Orient comme en Occident, pour transmettre les textes bibliques par leur architecture et leur décoration.
Le tableau représente Étienne, protomartyr (premier martyr) du christianisme.
Comment en était-on arrivé à lapider Étienne ?
Après sa Passion, sa mort et sa Résurrection (Pâques), le Christ monté au Ciel (Ascension), avait répandu l’Esprit-Saint sur les disciples à Jérusalem (Pentecôte). Peu après la Pentecôte, les disciples de Jérusalem sont persécutés. Le premier qui le paye de sa vie est Étienne.
Penchons-nous un peu sur le tableau de Rubens :
Étienne est en plein centre d'une composition extrêmement dynamique. Les personnages qui l’encerclent sont ses tortionnaires. Le regard de chacun est prolongé par un geste qui emporte le spectateur dans un effet de tourbillon et l’invite à rejoindre Étienne au centre du tableau.
Chaque action en entraîne une autre, jusqu’au coup fatal porté par le personnage aux yeux révulsés situé vers la droite au milieu de la composition.
Le visage d’Étienne est blême et meurtri. Son regard, implorant, est tourné vers le ciel qui s’ouvre à ses yeux. Que voit-il ? Un ange lui dépose une couronne sur la tête. Comme on l'a rappelé dans la pépite, le nom d’Étienne dans le texte grec est Stephanos.
👉 Or, Stephanos signifie justement « couronne ». Cette couronne deviendra le symbole des martyrs dans toute la peinture. Dès que vous en verrez une, vous pourrez raconter l’histoire…
Surtout, saint Étienne voit le Christ portant un vêtement rouge, comme lui.
👉 Ce vêtement rouge symbolise aussi celui du martyr : l'habit blanc de pureté est devenu rouge après avoir trempé dans le sang du témoignage.
Étienne est ainsi représenté comme un successeur du Christ, un témoin (en grec « martyr »). S’il est là, c’est qu’un Autre est passé avant lui par cette épreuve : le Fils de Dieu.
La composition se divise en 2 registres séparés par une ligne de construction oblique :
Pour représenter la scène de lapidation, la palette se compose de couleurs vives et la musculature des corps est poussée à l’extrême, ce qui provoque une impression d’écrasement, de tension et de violence contenue.
Ici, les couleurs se déclinent, par opposition, dans des tonalités de pastel nacré. Les tensions n’ont plus lieu d’être. Après l’épreuve de la grande tribulation, vient l’heure de la paix éternelle puisque le Christ a déjà fait ce chemin et a ouvert à tous les hommes les portes du Paradis par sa mort et sa Résurrection.
On était assez ému d'écrire ce numéro. Parce que le lieu du martyre de saint Étienne est vénéré à Jérusalem pas loin de la Porte de Damas. Ce lieu, c'est le couvent Saint-Étienne où est érigée l'École Biblique et d'Archéologie Française de Jérusalem. Là où tout a commencé pour PRIXM en 2015. Bref, Étienne est un peu l'un des saints-patrons de PRIXM et il fallait bien le génie de Rubens pour lui rendre hommage.
Du coup n'hésitez pas à vous rendre à Jérusalem ou plus simplement à Valenciennes pour admirer la prouesse de Rubens.
Plusieurs siècles après, le philosophe chrétien Boèce connut lui aussi les affres de la persécution. L’expérience qu’il relate dans ces lignes fait penser au martyre de saint Étienne que peindrait bien plus tard Rubens :
« Ainsi se dissipèrent les brumes de mon affection ; je bus la lumière céleste et repris mes esprits afin de faire la connaissance de celle qui me soignait. Et à peine m’étais-je retourné pour l’observer, que je reconnus ma mère nourricière, celle dont j’avais fréquenté la demeure dès ma jeunesse : la Philosophie [porte-parole de Dieu chez Boèce]. « — Mais, demandais-je, que fais-tu ici, dans le désert de mon exil, ô maîtresse de toutes les vertus ? Pourquoi être descendue de tes cimes célestes ? Serait-ce pour partager avec moi les persécutions de la calomnie ? »
Boèce, Consolation de la philosophie, Livre I,6, Petite bibliothèque Rivegas, 1982.
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