Découvrez le génie littéraire de Jean pour raconter la Résurrection ! Comment réussit-il à mettre en avant le point de vue des disciples ?
Entourée d'un chœur, l’inimitable voix basse de Johnny Cash qui chante la croix et la résurrection du Christ résonne dans le cadre so vintage des sixties pour son titre Were you there when they crucified my Lord.
Marie de Magdala annonce à Pierre et un autre disciple la disparition du corps du Christ dans le tombeau.
Le premier jour de la semaine, Marie-Madeleine vint le matin, alors que les ténèbres étaient encore, au sépulcre et elle vit la pierre enlevée du sépulcre. Elle courut donc et vint vers Simon-Pierre et vers l’autre disciple que Jésus aimait et leur dit :
— Ils ont enlevé le Seigneur du sépulcre, et nous ne savons où ils l’ont mis.
Pierre sortit alors avec l’autre disciple et ils allèrent au sépulcre. Ils couraient tous deux ensemble, mais l’autre disciple courut plus vite que Pierre et arriva le premier au sépulcre. Et, s’étant penché, il aperçut posés-là les linceuls, mais il n’entra pas.
Arriva donc aussi Simon-Pierre qui le suivait et il entra dans le sépulcre et il contempla les linceuls posés-là, et le suaire qui était sur sa tête, non pas posé avec les linceuls mais enroulé à part en un lieu.
Alors entra aussi l’autre disciple qui était arrivé le premier au sépulcre, et il vit et il crut.
Par sa finesse, sa structure et son sens du détail, le texte de l’Évangile selon saint Jean est un bijou littéraire.
Il recèle des trésors qui se laissent découvrir peu à peu, comme un grand vin qui, vieillissant, dévoile de nouvelles subtilités.
Dans le récit de la découverte du tombeau vide, il faut se pencher sur l’usage des verbes pour découvrir une merveille. La version française n’étant pas suffisante, on vous propose de vous pencher sur la version grecque pour vous le montrer :
Ici, le disciple en voyant fait l’expérience du regard vers l’au-delà : il perçoit le sens invisible, il porte un regard métaphysique sur la réalité. Les deux composants du mot métaphysique, en grec : meta et phusis, signifient littéralement « au-delà du physique ».
Voilà un regard d’espérance de toute l’humanité : à travers l’absence visible des morts, percevoir leur présence invisible. Pour le chrétien, cet espoir universel trouve sa source en Dieu-fait-homme qui a relevé de la mort Sa chair stigmatisée, et qui est toujours présent, au-delà du visible.
En utilisant trois verbes différents, le texte dévoile ainsi trois nuances différentes de regard. Par son style, l’auteur de l’Évangile offre une profondeur de sens incommensurable* à découvrir sans cesse.
*mot compliqué pour dire « sans commune mesure » !
L’expérience de la lecture d’une œuvre littéraire qui dévoile sans cesse quelque chose de neuf nous a fait penser à cette sublime histoire du théologien orthodoxe Olivier Clément, qui définit la poésie comme un dévoilement :
« L’expression poétique rend compte d’un certain éveil, d’un certain étonnement. Elle permet de découvrir, de sentir, de s’émerveiller.
C’est l’histoire du petit garçon qui voit un peintre en train de peindre un arbre. Il lui dit : « Pourquoi peins-tu ce peuplier puisqu’il est là ? » Et le peintre lui répond : « Pour que tu le voies ! »
Olivier Clément (1921-2009), Mémoires d’espérance, Paris, Desclée De Brouwer, 2003, p.219