Découvrez qui est Judas Iscariote, le disciple qui trahit Jésus. Pourquoi se suicide-t-il ? Quel est son lien avec Pierre ?
Dans le film Silence de Martin Scorsese, sorti en 2016, le personnage de Kichijiro est une figure emblématique de Judas repenti. À plusieurs reprises dans ce film, il trahit ses amis, tout comme Judas trahit le Christ.
Mais, à la différence de Judas, Kichijiro est à chaque fois pris de remords sincères et vient demander pardon pour ce qu’il a fait.
Aujourd’hui, penchons-nous spécifiquement sur le personnage de Judas dans l’évangile de Matthieu. Voici le récit de sa trahison envers Jésus.
Alors l’un des Douze, appelé Judas Iscariote, alla trouver les grands prêtres, et dit :
— Que voulez-vous me donner, et je vous le livrerai ?
Et ils lui fixèrent trente pièces d’argent. Depuis ce moment, il cherchait une occasion favorable pour livrer Jésus. [...]
Comme il parlait encore, voici que Judas, l’un des douze, arriva et avec lui une foule nombreuse avec des glaives et des bâtons de la part des grands prêtres et des anciens du peuple. Celui qui le livrait leur avait donné un signe, disant :
— Celui à qui je donnerai un baiser, c’est lui, saisissez-le.
Et s’approchant aussitôt de Jésus, il dit :
— Salut, rabbi ; et il lui donna un baiser.
Jésus lui dit :
— Ami, c'est pour cela que tu es là.
Alors ils s’approchèrent, mirent la main sur Jésus et le saisirent. Et voici qu’un de ceux qui étaient avec Jésus étendant la main tira son glaive et frappant l'esclave du grand prêtre emporta son oreille. Alors Jésus lui dit :
— Remets ton glaive à sa place car tous ceux qui prennent le glaive périront par le glaive. Penses-tu que je ne puisse pas supplier mon Père et il me fournira sur-le-champ plus de douze légions d’anges ? Comment donc s’accompliraient les Écritures d’après lesquelles il doit en être ainsi ?
À cette heure-là Jésus dit aux foules :
— Comme contre un brigand, vous êtes sortis avec des glaives et des bâtons pour me prendre ! Chaque jour dans le temple j’étais assis enseignant et vous ne m’avez pas saisi. Mais tout cela est arrivé afin que fussent accomplies les Écritures des prophètes.
Alors tous les disciples le laissant, s'enfuirent.
Le matin venu, tous les grands prêtres et les anciens du peuple tinrent conseil contre Jésus en sorte de le faire mourir. Et, l'ayant entravé, ils l'emmenèrent et le livrèrent à Ponce Pilate, le gouverneur.
Alors Judas, qui le livrait, voyant qu’il avait été condamné, se repentant, retourna les trente pièces d’argent aux grands prêtres et aux anciens en disant :
— J’ai péché en livrant un sang innocent.
Mais eux lui dirent :
— Que nous importe ? À toi de voir.
Ayant jeté les pièces d’argent dans le Sanctuaire, et s’étant retiré, il se pendit.
Alors l’un des Douze, appelé Judas Iscariote, alla trouver les grands prêtres, et dit :
— Que voulez-vous me donner, et je vous le livrerai ?
Et ils lui fixèrent trente pièces d’argent. Depuis ce moment, il cherchait une occasion favorable pour livrer Jésus. (Mt 26, 14-16)
Le nom de Judas, Iscariote, permet de le distinguer de l’autre Judas : « Jude fils de Jacques » (Lc 6,16) appartenant aussi au groupe des Douze.
En hébreu « Iscariote » signifie « homme de Keriot », village à seize kilomètres au sud d’Hébron. La ville d’Hébron est elle-même située à 50 km au Sud de Jérusalem.
Ces traductions possibles du terme « iscariote » participent à la légende noire que la tradition chrétienne a forgée autour du personnage de Judas, en le chargeant de tous les maux.
Judas Iscariote est celui des Douze qui livre Jésus. Dans l’évangile de Matthieu, c'est lui qui mène presque exclusivement le jeu, qui est à l’initiative d’une négociation et qui demande à être payé (Mt 26, 14-16).
La mention de l’appartenance de Judas au groupe des douze est d’ailleurs un détail en faveur de la véracité de la parole évangélique transmise par les apôtres, comme l’explique Jean Chrysostome :
« [Les évangélistes] ne cachent rien de ce qui peut les humilier ; alors qu’ils auraient pu dire simplement que Judas était du nombre des disciples. »
Jean Chrysostome : Commentaire sur l'évangile selon saint Matthieu, trad. Jacques de Penthos, Perpignan : Artège, 2012.
Alors Judas, qui le livrait, voyant que [Jésus] avait été condamné, se repentant, retourna les trente pièces d’argent aux grands prêtres et aux anciens en disant :
— J’ai péché en livrant un sang innocent.
Mais eux lui dirent :
— Que nous importe ? À toi de voir.
Ayant jeté les pièces d’argent dans le Sanctuaire, et s’étant retiré, il se pendit. (Mt 27, 3-5)
Au moment de la condamnation de Jésus, Judas réalise qu’il a livré l’innocent à la mort. Dégoûté par sa trahison, il désespère de la miséricorde de Dieu et met fin à ses jours. La pendaison de Judas est d’ailleurs relatée uniquement dans l’évangile de Matthieu.
Cet épisode du suicide de Judas est finalement à mettre directement en parallèle avec le récit du reniement de Pierre. Pourquoi ? Parce que l’un comme l’autre trahissent le Christ au moment de sa mort, alors qu’ils ont passé plusieurs années auprès de lui sur les routes de Galilée.
Et finalement, le problème n’est pas que Pierre renie Jésus, ni que Judas le vende et le trahisse pour quelques pièces qu’il refusera ensuite. Non, aussi choquant que celui puisse paraître, la question n’est pas là. La vraie distinction, c’est que Judas se pend alors que Pierre fond en larmes.
Le cœur de ce récit parallèle entre Judas et Pierre repose sur la question fondamentale de l’acceptation de la miséricorde divine, même s'il est vrai que trahir en reniant est une chose et que trahir en livrant à la mort en est une autre.
Repenti, Judas aurait pu revenir à la suite de Jésus, comme Pierre, mais il désespère. Il se pend, mais pourquoi ? Refuse-t-il de croire que Dieu est capable de tout, et même de pardonner à son bourreau ?
Pierre n’est pas meilleur que Judas, et il n’est pas choisi par Jésus en vertu de ses qualités ou de sa fidélité. Car Pierre, tout comme Judas, est un pécheur.
En revanche, Pierre pleure et se laisse toucher par le pardon et la grâce que Jésus lui accorde après l'avoir regardé.
La figure de Judas a largement fasciné les auteurs au cours des longs siècles de l’histoire de la littérature. On a choisi de conclure avec le mot de François Mauriac, prix Nobel de Littérature 1952. Il voit en Judas la part d’ombre de tout homme. Et il fait également le rapprochement entre Judas et Pierre :
« [Judas est celui qui] aurait pu devenir un saint, le patron de nous tous qui ne cessons de trahir. Il s’en est fallu de très peu que les larmes de Judas ne fussent confondues, dans le souvenir des hommes, avec celles de Pierre. »
François Mauriac (1885-1970), Vie de Jésus, Paris : Flammarion, 1936, p. 257
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