Qui a vraiment tué Jésus ? Les Juifs, souvent désignés comme un peuple déicide, ne sont pas les coupables. On vous explique pourquoi !
À la fin de son titre Boulbi, morceau devenu un classique du rap français, Booba déclare : « C’est pas la rue mais l’être humain qui m’attriste. Comment leur faire confiance, ils ont tué le Christ. »
Si la question des responsables de la mort du Christ est un motif de désespoir pour B2oba, Karl Rahner lui donnera une raison d’espérer dans l’éclairage.
Ceux qui avaient arrêté Jésus l’emmenèrent chez Caïphe le grand prêtre où se réunirent les scribes et les anciens. Pierre le suivait de loin jusqu’au palais du grand prêtre. Ayant pénétré à l'intérieur, il était assis avec les servants pour voir la fin. Les grands prêtres et tout le Sanhédrin cherchaient un faux témoignage contre Jésus pour le faire mourir mais ils n’en trouvèrent pas, alors que beaucoup de faux témoins s'étaient approchés.
Finalement, vinrent deux faux témoins qui dirent :
— Cet homme a dit : "Je peux détruire le sanctuaire de Dieu et le rebâtir en trois jours."
Se levant, le grand prêtre lui dit :
— Tu ne réponds rien ? De quoi ces hommes témoignent-ils contre toi ?
Mais Jésus gardait le silence. Et le grand prêtre lui dit :
— Je t’adjure par le Dieu vivant de nous dire si tu es le Christ, le Fils de Dieu.
Jésus lui dit :
— Tu le dis. Cependant je vous dis : Désormais vous verrez le fils de l’homme assis à la droite de la Puissance et venant sur les nuées du ciel.
Alors le grand prêtre déchira ses vêtements, disant :
— Il a blasphémé. Qu’avons-nous encore besoin de témoins ? Là, vous avez entendu le blasphème : qu'en pensez-vous ?
Et eux, en réponse, dirent :
— Il mérite la mort.
Le peuple juif a longtemps été stigmatisé et persécuté, en tant que peuple « déicide » — littéralement : qui aurait « tué-Dieu » — du fait qu'ils seraient coupables de la mort de Jésus, Dieu fait homme.
Dans un numéro précédent, nous avions proposé des éléments de réponse pour contrecarrer cette erreur tragique. L’un de nos lecteurs nous a depuis écrit pour en ajouter deux nouveaux. Les voici :
Le mot grec Ioudaioi employé dans les évangiles, le plus souvent traduit par « Juifs », désigne :
Les Judéens sont les habitants de la région de Judée (dont fait partie Jérusalem). Les Galiléens habitent la région de Galilée (où se trouve Nazareth), plus au Nord. La Judée et la Galilée sont distantes de moins de 100 km, mais on reconnaît l’accent des Galiléens qui n’est pas le même que celui des Judéens (Mt 26,73).
Cette opposition traverse tout l’Évangile !
Conclusion : Le mot grec Ioudaioi traduit en latin Judaei puis Juifs, Jews, Juden, etc. dans les langues européennes, a désigné systématiquement tout le peuple de Jésus. Une généralisation abusive qui a contribué à nourrir le préjugé erroné des « Juifs déicides ».
Enfin, l'argument théologique suffit à lui seul à balayer l'accusation : Jésus est mort pour tous les hommes, et à cause des péchés de chacun d'entre nous. Dans sa mort, certains grands prêtres (et non pas tout le peuple) et le gouverneur Pilate ont été les instruments de la volonté divine de sauver l'humanité.
Comme le dit Jésus lui-même :
« Tout cela est arrivé afin que s'accomplissent les Écritures des prophètes. » (Mt 26,56)
Du coup Karl Rahner redonne une raison à Booba de faire confiance à l’humanité !
Dans une magnifique chronique en hommage au père Hamel assassiné dans son église, l'écrivain François Sureau rappelle avec majesté le procès inique de Jésus. Le texte commence par évoquer le père Hamel et la messe qu’il célébrait au moment où il fut assassiné :
« Il ne priait pas seulement, il célébrait, pour le monde entier représenté par son petit troupeau de cinq personnes, le sacrifice volontaire d’un juif de Palestine, mis à mort par un politique étranger, à l’instigation des prêtres et aux applaudissements de la foule : le sacrifice d’une victime entièrement innocente, rachetant tous les crimes du passé et de l’avenir, privant à jamais le meurtre de toute justification devant Dieu. »
François Sureau, « En souvenir de Jacques Hamel », La Croix, 30 août 2016.